Retail Technology Show : faire rimer omnicanal et durabilité
« La technologie a, sans aucun doute, un pouvoir de destruction ou de créativité extraordinaire », déclare Mary Portas. Lors de son intervention au Retail Technology Show 2023, la ‘Queen of Shops’ a salué les innovations du retail durant la pandémie de COVID-19, transformant les entreprises grâce aux échanges, à la collaboration et à la communauté. « Nous vivons la période la plus innovante et créative que je n’ai jamais connue depuis que je suis dans le secteur du retail. »
Retour sur les mutations actuelles du retail et sur le pilotage d’initiatives durables !
Retail Technology Show : L’avenir du retail omnicanal se trouve-t-il dans l’économie bienveillante ?
Mary Portas a débuté sa carrière dans l’industrie en croyant que le succès du retail était déterminé par les ventes, les profits et la croissance, contribuant au développement de certaines des plus grandes enseignes du secteur. Mais, ce faisant, elle déclare : « Nous ne nous sommes pas rendu compte que nous épuisions les ressources de la planète et… que nous causions une grande anxiété à beaucoup de monde. »
Aujourd’hui, elle souhaite toujours voir les retailers prospérer, mais cela doit se faire de façon responsable. Elle appelle cela l’économie de la bienveillance, qui place l’humain et la planète avant les profits. De nombreuses entreprises à succès ont déjà été construites dans ce sens – comme Patagonia, Lush et Aesop, éthiques depuis leur création.
Toutes les marques peuvent devenir encore meilleures en repensant les campagnes marketing pour déterminer si elles suscitent des angoisses ou encouragent à la surconsommation. Mary affirme que chaque retailer devrait se demander pourquoi il participe au Black Friday : « c’est simplement un moyen de vendre plus, sans aucune générosité au cœur du processus. »
Il y a une réelle demande de changement – plus de 80% des personnes souhaitent faire leurs achats auprès de marques qui partagent leurs valeurs – mais les retailers ont pris trop de temps pour s’adapter. C’est pourquoi Mary a fondé le Better Business Act, une campagne menée par les entreprises visant à modifier la législation afin de garantir que chaque entreprise britannique, qu’elle soit grande ou petite, assume son impact social et environnemental.
« C’est un changement culturel », déclare Mary. « Nous sommes en territoire inconnu et il n’y a pas de carte à suivre, seulement une boussole, et la seule boussole que vous devriez utiliser est une boussole morale. »
Comment les enseignes omnicanales peuvent-elles composer avec l’humain, la planète et le profit ?
Paul Martin, Head of Retail au sein du cabinet de conseil KPMG, s’accorde à dire que les retailers doivent placer l’humain, la planète et le profit au cœur de leurs priorités.
La pénurie actuelle de talents est l’un des plus grands défis auxquels les retailers sont confrontés. Alors que les salaires augmentent pour attirer et fidéliser les employés, les effectifs et les investissements dans la technologie et la formation ont été réduits pour éviter une trop grande perte de marge. Cependant, cette solution à des coûts souvent sous-estimés sur le long terme.
Simon Pakenham-Walsh, CTO chez Sweaty Betty, a décrit comment un système POS obsolète avait entraîné de longues files d’attente en boutique, sans aucune assistance disponible. De mauvaises expériences client de ce type ont un impact direct sur les ventes. Le déploiement d’un nouveau point de vente mobile a permis aux équipes de vente de passer plus de temps à discuter avec les clients et à les guider correctement dans leur parcours d’achat.
Le rôle d’un collaborateur en magasin est souvent sous-estimé. Ils ont le potentiel d’influencer les choix d’achats des consommateurs, de recueillir des informations précieuses sur ces derniers et de devenir un élément de confiance pour la clientèle locale. Cependant, pour être efficaces dans ces rôles, ils doivent être rémunérés équitablement, formés et équipés des technologies adéquates. Sans parler des les remplacer, l’automatisation peut les libérer des tâches répétitives, leur permettant de mieux servir les clients et d’assumer de nouveaux rôles, sur le terrain ou au sein de la Supply Chain.
Pour répondre à la demande des consommateurs en matière de durabilité, de plus en plus de retailers lancent des initiatives de seconde main, notamment dans le domaine de l’habillement, où le marché de l’occasion devrait croître trois fois plus vite que le marché global de la mode. Dans le domaine de l’ameublement, l’initiative d’IKEA propose des crédits en magasin pour les articles d’occasion revendus sur place grâce à leur programme de rachat et de revente.
Håkan Nordkvist, ancien Head of Sustainability and Innovation chez IKEA, a souligné que la gestion en interne de l’inspection et de la remise en état des produits retournés a bénéficié de leur connaissance des produits et du respect de leur standard de “bonne condition”. Ce fut aussi l’opportunité de transformer ce processus en un nouveau service pour les clients, et une nouvelle source de revenus pour eux. Malgré le coût de la reverse logistics, l’accent doit être mis sur la durée de vie à long terme et la rentabilité de chaque produit.
Comment développer une Supply Chain solide ?
Paul Martin a également souligné quelques thèmes clés d’actualité sur lesquels les professionnels de la Supply Chain devraient se concentrer d’après KPMG.
À la suite d’une série d’événements géopolitiques sans précédent qui ont fondamentalement modifié le flux des marchandises, les retailers doivent accroître leur agilité. Amy McNamara, responsable des opérations chez Boohoo Group, a également souligné la nécessité de bénéficier de Supply Chain plus souples afin de minimiser les perturbations. Le groupe dispose actuellement de 20 partenaires de transports différents, offrant diverses options pour s’adapter lorsque la capacité impacte les délais de livraison. Kevin Davis, ancien responsable de la logistique chez Marks & Spencer, ajoute que les retailers devraient disposer de leur propre réseau de transporteurs pouvant s’adapter selon les localisations géographiques.
Alors que chaque maillon de la chaîne d’approvisionnement lutte contre la diminution des marges, les retailers doivent également favoriser la collaboration. En collectant des données tout au long de la Supply Chain et en les partageant avec les partenaires commerciaux, les retailers pourront répondre plus rapidement aux demandes des clients, tout en approvisionnant chaque point de distribution avec les produits adaptés. Pour parvenir à ce résultat, il est nécessaire de bénéficier d’une bonne visibilité sur la Supply Chain et une orchestration intelligente des commandes, le tout supervisé par un outil d’analyse des données.
Enfin, Paul Martin estime que la Supply Chain a « un rôle majeur à jouer dans l’avenir du développement durable ». Les informations clients peuvent aider à réduire l’approvisionnement de produits non vendus, tandis que l’optimisation des stocks et l’allocation des commandes peuvent réduire les kilomètres parcourus par les marchandises et l’emballage.
Boohoo Group s’est associé au transporteur à émission zéro HIVED pour réduire l’impact environnemental de leurs livraisons, tandis que Laura Rosenberger, co-fondatrice de Laylo, s’est associée à de grands groupes du retail pour remplir les espaces vides et livrer à camions pleins, partageant ainsi leurs économies d’échelle tout en réduisant le nombre de véhicules sur la route.
Retail Technology Show : Zoom sur l’expérience client omnicanale
Les boutiques continueront également à jouer un rôle central dans la Supply Chain des retailers omnicanaux, car les consommateurs demandent des livraisons de plus en plus rapides et flexibles.
Le confort offert par le réseau de magasins de Screwfix, spécialisé dans la quincaillerie, revêt une importance capitale pour leurs clients, 80% des ventes sont effectuées par les boutiques. Screwfix a ouvert un nouveau point de vente chaque semaine au cours des 10 dernières années. Aujourd’hui, plus de 95% de la population britannique vit à moins de 20 minutes d’un magasin Screwfix.
Grâce à une vision des stocks en temps réel, les artisans peuvent vérifier la disponibilité des articles dont ils ont besoin dans le magasin le plus proche et les réserver en un clic pour les récupérer dans les minutes suivantes. Si ces derniers ne peuvent pas quitter leur lieu de travail, Screwfix Sprint propose une livraison en main propre en 60 minutes pour 7000 articles. La livraison la plus rapide à ce jour a seulement pris sept minutes !
Grâce à ses options de livraisons, Screwfix répond assurément à sa mission d’aider les clients à accomplir leurs travaux rapidement et à moindre coût. Sue Harries, Digital Propositions & Data Director chez Screwfix, déclare que ces innovations s’inscrivent dans l’ADN de la marque et sont le fruit d’une compréhension des désirs et des besoins de leurs clients – Screwfix dispose d’un panel de 20.000 clients auxquels ils demandent régulièrement des retours.
« Que veulent les clients ? » a demandé Kate Hardcastle, ‘The Customer Whisperer’, lors de sa conférence. Avoir une bonne compréhension du client et de ses désirs aidera les retailers à déterminer les stratégies et les technologies pour améliorer la rentabilité et fidéliser. « Il s’agit de trouver votre voie et de construire une relation durable. »
« Nous connaissons tous l’équation de base du retail” explique Kate. « Acquérir un client coûte beaucoup plus cher que le fidéliser. Fidélisons-les ! »